Marketing et géocaching

Yannig Roth fait dans son blog la critique d’un livre de marketing où l’on parle de l’émergence des marques
de communautés telle le géocaching

L’émergence des marques de communauté
(et pas l’inverse!)

17 février 2011
par yannigroth

Aujourd’hui, il existe de plus en plus de communautés de marques. Certaines sont anciennes (Harley-Davidson), d’autres sont plus récentes dans l’histoire d’une marque (Nutella). Certaines représentent la quasi-totalité du capital de l’entreprise (Warhammer), et d’autres sont beaucoup plus périphériques et marginales (Orange). Le point commun entre toutes ces communautés, cependant, est qu’elles sont créées et exploitées à des fins commerciales, et la majorité des consommateurs en sont bien conscients (et ils jouent le jeu s’ils y voient un intérêt). Dans l’excellent livre Marketing critique: le consommateur collaborateur en question, j’ai cependant découvert un concept nouveau : la marque de communauté. Des exemples ? 

Déjà, il convient de préciser qu’une marque de communauté est une marque, c’est à dire un signe (mot, image, slogan…) qui permet de la distinguer d’autres phénomènes ou concepts. Une marque n’est pas nécessairement commerciale, comme par exemple la marque de l’ONG WWF ou de la Fondation Abbé Pierre. Et lorsqu’une marque émane d’un mouvement communautaire comme le festival Burning Man, le mouvement Slow Food ou le collectif d’origine parisienne Untergunther, alors on parle de marque de communauté. Autrement dit, il s’agit de « projets [qui] acquièrent une telle notoriété au niveau mondial qu’ils en deviennent des véritables marques en concurrence directe avec les marques commerciales dans l’esprit du consommateurs« , comme le soulignent les trois auteurs Cova, Louyot-Gallicher et Bonnemaizon.

La volonté de ces communautés est d’abord d’agir sur la société, et cela se traduit ensuite par une action sur le marché qu’elles viennent perturber par leurs offres souvent gratuites

Trois autres exemples très parlants sont cités dans le livre : le bookcrossing, le géocaching ou le fameux couchsurfing. Je vous laisse découvrir par vous-même de quoi il s’agit. Vous pensez qu’il ne s’agisse que de phénomènes de mode ? N’empêche que les phénomènes de mode n’ont a priori pas de site web, de slogan et de produits dérivés. Si je tape « cocooning » dans mon moteur de recherche, par exemple, je tombe sur un article explicatif de Wikipédia (tiens, encore une marque de communauté !) et pas sur un site de la marque cocooning. Le site américain du géocaching contient un lien direct vers un espace de vente de matériel brandé « GEOCACHING ».

capture-d-ecran « Couchsurfing » = un logo, une marque ! 

Le point important est que ces « tribus entrepreneuriales [sont] capables de co-créer leurs activités » et sont des acteurs sur différents marchés. Les 700 000 adeptes du bookcrossing fréquentent moins les librairies et les bibliothèques, les 1 200 000 canapés disponibles sur couchsurfing.org représentent une alternative directe au bed & breakfast ou à l’hôtel. Par contre, je ne sais pas sur quel marché positionner le géocaching… et ses 5 000 000 de membres ! En plus de la taille du réseau, ces marques ont un autre avantage concurrentiel : « tout est fait par jeu et c’est bien cela qui leur constitue un avantage concurrentiel monstrueux vis-à-vis des marques conventionnelles« , précisent les auteurs.

La marque de communauté n’a donc pas un sens filtré par l’entreprise, mais un sens multiplié par la communauté

Je me demande cependant si ces marques sont appelées à devenir des marques à vocation commerciale… certainement que cela les décrédibiliserait ! J’ai déjà évoqué l’exemple de la co-création dans le secteur du jeu et les dangers sous-jacents à la passion des participants (=des consommateurs). En même temps, j’adopte ici la mauvaise posture : il ne s’agit pas de voir si les marques de communautés vont évoluer vers les modèles du marketing classique, mais plutôt l’inverse. Cette capacité des entreprises à non seulement « mettre en marché » mais aussi à « mettre en société » est appelée societing, ais-je appris dans le livre. Ca paraît un peu fumeux… mais aussi extrêmement pertinent !

le blog de Yannig Roth